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Vol Qantas QF32 - A380
Vol Qantas QF32 - A380
Avec un peu (beaucoup) de retard, j’en avais parlé à certains et comme promis je vais conter mon histoire qui n'est pas la mienne du tout en fait...
Il y a maintenant un an, quand j'étais encore en Angleterre pour mes études à l'Université de Cranfield, j'ai eu la chance (je n'étais pas le seul bien sûr) d'assister à une conférence et de rencontrer le Capitaine David Evans.
Un de ces grands bonshommes qu'on ne rencontre pas souvent, une armoire à glace et surtout un sacré pilote avec 32 ans d'expérience et plus de 18 000 heures de vol... Il venait nous parler de l'incident du 4 Novembre 2010 sur le vol Qantas, QF 32. Cet incident avait fait pas mal de bruit dans les journaux puisqu'il était le premier (de cette importance) à arriver sur l'A380 et puis comme souvent les journaux ont relaté les faits sans vraiment les connaitre!
Bref, il venait à la fois pour parler de cet incident mais également pour parler de l'interaction entre les différents membres d'équipage en cabine et de l'interface homme/machine et notamment des messages ECAM (pour ceux qui connaissent), sinon un petit lien => http://en.wikipedia.org/wiki/Electronic_centralised_aircraft_monitor
Tout a commencé le 4 novembre 2010 à 9.30am, le vol était parti d'Angleterre pour rejoindre l'Australie et faisait une escale avec changement d'équipage à Singapoure.
Dans la cabine, il y avait David Evans (supervising check captain) en gros il était là pour superviser et valider la formation d'un commandant de bord à devenir lui-même superviseur, le commandant de bord au commande de l'avion, le copilote (first officer) et le mécanicien (second officer), un autre commandant de bord (celui qui se faisait évaluer) et le chef de cabine. Pour la petite anecdote, ils totalisaient 140 années d'expériences et 71 000 heures de vol
Tout ce petit monde a donc décollé à 9.30 de l'aéroport de Changi Singapour pour Sidney avec 432 passagers. L’avion était assez léger, donc faible poussée nécessaire pour le décollage. Décollage depuis la piste sud-est, nécessité après le décollage d’effectuer un virage à gauche afin de suivre la direction de l’Ile de Batam. Montée et accélération de l’avion pour atteindre après 1/2 heure de vol, 7 000 ft. C’est à ce moment que le moteur n°2 explosa (sans avertissement, enfin pas vraiment mais j'y reviendrai).
La première alerte au moment de l’incident a été l’alarme qui a retenti et qui alerta l’équipage d’un problème. De sa position David Evans n’avait pas une bonne visibilité des instruments de vol. Il était debout et regardé par-dessus l’épaule du copilote.
Un premier message ECAM est apparu et concernait le moteur n°2 pour une « Température trop élevée ». Il a donc fallu réagir à cela. Pour cela ils ont suivis la procédure suivante : ramener la commande des gaz (procédure temporelle sur 30 secondes) afin de faire baisser la température et la rendre stable. Au cours de ces 30 secondes, le message initial s’est reconfiguré en message « Feu moteur » puis et repassé au message initial « Température trop élevée ».
Mais au bout des 30 secondes la température moteur n’était pas redescendue ou stabilisée et la procédure s’est automatiquement relancée pour 30 secondes supplémentaires. Le copilote a donc décidé de stopper la procédure (aucun effet sur la température).
Il a été décidé de stopper le n°2 en suivant les recommandations ECAM :
_ Vidange de bouteilles, sortes « d’extincteurs » que l’on vide dans le moteur au moment de son arrêt (dans le cas d’incendie ou forte température).
A la suite de ces différents messages, d’autres messages sont apparues (43 au total…) et notamment :
_ Endommagement moteurs n°1 et n°4 (le n°3 était donc le seul à fonctionner correctement)
_ Problèmes hydrauliques
_ Système/circuit hydraulique vert perd tout son fluide (L’A380 par rapport à d’autres avions conventionnels, n’en possède que 2 (vert et jaune). La plupart de ces surfaces de vols ne sont pas commandées hydrauliquement mais elles possèdent leurs propres actuateurs électro-hydrauliques).
Ces deux systèmes commandent les freins, les trains d’atterrissage, …
Il est donc nécessaire d’avoir ces 2 circuits en état de fonctionnement afin de pouvoir commander l’ensemble des ces systèmes de vol.
Le système jaune fourni par le moteur n°3 était donc le seul en état de fonctionnement et disponible à fournir de l’hydraulique à l’avion.
Or les trains d’atterrissage sont commandés par le circuit vert, ce dernier étant inutilisable, il a donc fallu faire appel au système d’extension de gravité (Gravity Extension System).
A ce moment là, pour David Evans et tout l’équipage, l’ensemble des messages et problèmes rencontrés sont assez confus et parfois même contradictoires, ils se rendent également compte que le problème est plus grave que prévu :
_ Perte du moteur n°2
_ Dégradation des moteurs n°1 et n°4
_ Perte d’un des circuits hydrau
_ Perte de commandes de vol du fait de l’endommagement des câblages électriques 1 et 2
Le rôle de David Evans au départ était de ne pas interférer dans les choix de l’équipage et notamment du commandant de bord. Le copilote réalisait les actions et suivait la checklist et David Evans n’était qu’un « témoin ».
Cependant au fur et à mesure des événements qui ont duré 2h (à partir de l’incident en vol à l’atterrissage), il a fallu gérer l’équipage, le coordonner et aussi rassurer et communiquer avec les passagers, ce qu’à fait David Evans.
Je continue donc, après l’arrêt du moteur n°2 et les divers messages d’erreurs, pertes de commande, il a fallu gérer une fuite de Kérosène assez importante au niveau du moteur n°2 ainsi qu’une belle trainée de Kéro + fluide hydrau derrière l’avion. Le souci, ici, était de savoir si les galeries/tuyauteries et systèmes de transfert étaient toujours opérationnels afin de pouvoir transférer le Kéro du côté gauche à droite et à l’arrière. La décision de l’équipage a été unanime : impossible de savoir si ils sont opérationnels donc aucun transfert de Kerosène (je reviendrai plus tard sur la conséquence de cette décision).
Les problèmes électriques ont conduit à la perte : _ Wing-brakes
_ Anti-skids
_ Leading-edge slats
_ Pression d’air
_ Air
_ Climatisation
_ Perte d’une des ordinateurs de commande des trains d’atterrissage, il était donc impossible de savoir si les trains étaient sortis ou non (utilisation du système d’extension/rétraction)
_ Autothrust et de tout le contrôle de la poussée a due se faire manuellement
Enfin les moteurs n°1 et 4 étant en mode « dégradé », seul le 3 fonctionnant normalement, la vitesse de l’avion n’était contrôlée uniquement que par le moteur n°3.
Est ensuite venu, la question : Est-il possible ou non de se poser sur la piste disponible ?
Il n’était pas possible « d’amortir » la masse de Kérosène embarqué et donc le surpoids de l’avion (le système étant inutilisable), surpoids d’environ 50 tonnes par rapport à la masse d’atterrissage maximale autorisée. L’application de performance a donc été utilisée. Cette application permet sur l’A380 de calculer les performances de l’avion lors de l’atterrissage en fonction des conditions extérieures et de certains paramètres (informés manuellement par les pilotes). Sur les 10 premiers paramètres pouvant affecter l’atterrissage et renseignés par l’équipage, l’application n’a pas été en mesure de faire le calcul… trop de problèmes, d’incidents. Le temps étant sec et l’expérience de l’équipage faisant, ils ont décidé d’éliminer certains paramètres, le calcul a alors pu être réalisé et les réponses ont été les suivantes : _ vitesse de descente de 165 kt
_ Longueur d’arrêt supplémentaire de 130m (sur une piste de 4000m)
_ « Normalement » atterrissage ok…
La perte des leading-edge slats associée au surpoids a conduit à une approche plus rapide que prévue (~35kt). Enfin l’impossibilité de transférer du kérosène a conduit à un gros déséquilibre d’environ 10 tonnes, il fallait donc savoir si le CoG de l’avion s’en trouvait modifié ou non => utilisation de l’application Weight and Balance afin de déterminer la position du CoG. Il en a résulté que le CoG se trouvait toujours dans l’enveloppe de vol, donc aucun souci.
Tout une phase de contrôle des commandes (celles qui fonctionnaient encore… ^^) s’est faite avant l’approche afin de vérifier la maniabilité et les perfo de l’avion. L’approche s’est ensuite faite à 20 miles et à environ 4 000ft (approche longue, douce et stable).
J’en arrive donc à la dernière phase de mon récit, l’atterrissage et notamment à ce qui s’est passé après l’atterrissage.
Une fois l’atterrissage réalisé, il a fallu organiser les secours et notamment les services incendies en bout de piste. Les gros problèmes qui se sont rapidement posés ont été :
_ Problème d’APU qui fonctionnait mal et donc ne pouvait fournir aucune charge électrique (pas top une fois au sol…). Ca à donc conduit au passage de l’avion en mode « essential ou battery power » qui implique que seule la VHF était disponible, pas évident pour communiquer avec les secours.
_ Le moteur n°1 tournait toujours, impossible de l’arrêter, personne ne voulait donc s’approcher de l’avion.
_ Fuite de Kérosène côté gauche (haute pression)
_ Les efforts au freinage étaient tellement importants qu’ils ont conduit à une température au niveau des freins d’environ 900°C => associée à la fuite de Kérosène => risque d’incendie
Comme je l’avais dit précédemment, l’incident en vol a duré environ 2 heures. Il en a été de même pour la suite de l’atterrissage (problèmes cités ci-dessus…). Entre le moment où l’avion s’est posé et le où le dernier passager à quitté l’avion, il s’est passé 2 heures…. Cette décision d’attendre a été prise par l’équipage pour des raisons de sécurité. Au cours des ces 2 heures, il a fallu gérer la perte de la VHF, remplacé par le téléphone satellite qui a lui-même lâché quelques minutes plus tard, remplacé enfin par le téléphone portable (relais entre l’équipage, la compagnie basée à Sidney et Singapour). Il a également fallu gérer les passagers pendant ces 2 heures d’attentes sans climatisation, en pleine chaleur (~12h à Singapour à ce moment là…).
Pour la petite anecdote le moteur a été arrêté en utilisant diverses mousses afin d’étouffer le moteur et de le ralentir progressivement.
Pour David Evans, le plus dur a été de gérer les passagers, de les rassurer au maximum mais également de gérer l’équipage. Gérer l’équipage dans le sens ou il a fallu faire la part des choses et savoir dissocier les messages ECAM (grand nombre) utiles de ceux « sans » importance. Il a également fallu faire les bons choix au bon moment.
Pour lui, n’importe quel bon équipage standard aurait pu faire la même chose et réussir à poser l’avion comme ils l’ont fait. Il l’a dit lui-même : « Nous avons juste eu la chance ce jour là, d’avoir 2 personnes de plus, un équipage plutôt expérimenté qui a pu confirmer les décisions et avoir un « certain » recul par rapport aux ECAM ».
Il a rajouté que l’A380 était une magnifique machine et que cet incident l’a conforté dans cela. Pour lui ça n’a en aucun cas changé sa vision et sa confiance en cet avion.
L’A380 ayant subit de gros dommage et les procédures étant assez longue, l’avion n’a repris du service qu’en mars/avril 2012, soit environ 16 mois après l’incident…
Voila, j’espère avoir été clair et surtout que cette histoire vous aura plu. Désolé s’il y a certains termes techniques, si vous avez des questions ou vous voulez des explications/traductions n’hésitez pas. Enfin je n’ai pas parlé des causes de l’accident et des dégâts sur l’avion et notamment au niveau de du fuselage. Je pense que ça aurait fait beaucoup
Quelques liens intéressant :
Le Trent 900 de RR: http://fr.wikipedia.org/wiki/Rolls-Royce_Trent_900
En bonus une petite vidéo expliquant le fonctionnement d'un turboréacteur, malheureusement en anglais... mais la vidéo est vraiment bien faite et c'est possible de comprendre uniquement avec la vidéo
Il y a maintenant un an, quand j'étais encore en Angleterre pour mes études à l'Université de Cranfield, j'ai eu la chance (je n'étais pas le seul bien sûr) d'assister à une conférence et de rencontrer le Capitaine David Evans.
Un de ces grands bonshommes qu'on ne rencontre pas souvent, une armoire à glace et surtout un sacré pilote avec 32 ans d'expérience et plus de 18 000 heures de vol... Il venait nous parler de l'incident du 4 Novembre 2010 sur le vol Qantas, QF 32. Cet incident avait fait pas mal de bruit dans les journaux puisqu'il était le premier (de cette importance) à arriver sur l'A380 et puis comme souvent les journaux ont relaté les faits sans vraiment les connaitre!
Bref, il venait à la fois pour parler de cet incident mais également pour parler de l'interaction entre les différents membres d'équipage en cabine et de l'interface homme/machine et notamment des messages ECAM (pour ceux qui connaissent), sinon un petit lien => http://en.wikipedia.org/wiki/Electronic_centralised_aircraft_monitor
Tout a commencé le 4 novembre 2010 à 9.30am, le vol était parti d'Angleterre pour rejoindre l'Australie et faisait une escale avec changement d'équipage à Singapoure.
Dans la cabine, il y avait David Evans (supervising check captain) en gros il était là pour superviser et valider la formation d'un commandant de bord à devenir lui-même superviseur, le commandant de bord au commande de l'avion, le copilote (first officer) et le mécanicien (second officer), un autre commandant de bord (celui qui se faisait évaluer) et le chef de cabine. Pour la petite anecdote, ils totalisaient 140 années d'expériences et 71 000 heures de vol
Tout ce petit monde a donc décollé à 9.30 de l'aéroport de Changi Singapour pour Sidney avec 432 passagers. L’avion était assez léger, donc faible poussée nécessaire pour le décollage. Décollage depuis la piste sud-est, nécessité après le décollage d’effectuer un virage à gauche afin de suivre la direction de l’Ile de Batam. Montée et accélération de l’avion pour atteindre après 1/2 heure de vol, 7 000 ft. C’est à ce moment que le moteur n°2 explosa (sans avertissement, enfin pas vraiment mais j'y reviendrai).
La première alerte au moment de l’incident a été l’alarme qui a retenti et qui alerta l’équipage d’un problème. De sa position David Evans n’avait pas une bonne visibilité des instruments de vol. Il était debout et regardé par-dessus l’épaule du copilote.
Un premier message ECAM est apparu et concernait le moteur n°2 pour une « Température trop élevée ». Il a donc fallu réagir à cela. Pour cela ils ont suivis la procédure suivante : ramener la commande des gaz (procédure temporelle sur 30 secondes) afin de faire baisser la température et la rendre stable. Au cours de ces 30 secondes, le message initial s’est reconfiguré en message « Feu moteur » puis et repassé au message initial « Température trop élevée ».
Mais au bout des 30 secondes la température moteur n’était pas redescendue ou stabilisée et la procédure s’est automatiquement relancée pour 30 secondes supplémentaires. Le copilote a donc décidé de stopper la procédure (aucun effet sur la température).
Il a été décidé de stopper le n°2 en suivant les recommandations ECAM :
_ Vidange de bouteilles, sortes « d’extincteurs » que l’on vide dans le moteur au moment de son arrêt (dans le cas d’incendie ou forte température).
A la suite de ces différents messages, d’autres messages sont apparues (43 au total…) et notamment :
_ Endommagement moteurs n°1 et n°4 (le n°3 était donc le seul à fonctionner correctement)
_ Problèmes hydrauliques
_ Système/circuit hydraulique vert perd tout son fluide (L’A380 par rapport à d’autres avions conventionnels, n’en possède que 2 (vert et jaune). La plupart de ces surfaces de vols ne sont pas commandées hydrauliquement mais elles possèdent leurs propres actuateurs électro-hydrauliques).
Ces deux systèmes commandent les freins, les trains d’atterrissage, …
Il est donc nécessaire d’avoir ces 2 circuits en état de fonctionnement afin de pouvoir commander l’ensemble des ces systèmes de vol.
Le système jaune fourni par le moteur n°3 était donc le seul en état de fonctionnement et disponible à fournir de l’hydraulique à l’avion.
Or les trains d’atterrissage sont commandés par le circuit vert, ce dernier étant inutilisable, il a donc fallu faire appel au système d’extension de gravité (Gravity Extension System).
A ce moment là, pour David Evans et tout l’équipage, l’ensemble des messages et problèmes rencontrés sont assez confus et parfois même contradictoires, ils se rendent également compte que le problème est plus grave que prévu :
_ Perte du moteur n°2
_ Dégradation des moteurs n°1 et n°4
_ Perte d’un des circuits hydrau
_ Perte de commandes de vol du fait de l’endommagement des câblages électriques 1 et 2
Le rôle de David Evans au départ était de ne pas interférer dans les choix de l’équipage et notamment du commandant de bord. Le copilote réalisait les actions et suivait la checklist et David Evans n’était qu’un « témoin ».
Cependant au fur et à mesure des événements qui ont duré 2h (à partir de l’incident en vol à l’atterrissage), il a fallu gérer l’équipage, le coordonner et aussi rassurer et communiquer avec les passagers, ce qu’à fait David Evans.
Je continue donc, après l’arrêt du moteur n°2 et les divers messages d’erreurs, pertes de commande, il a fallu gérer une fuite de Kérosène assez importante au niveau du moteur n°2 ainsi qu’une belle trainée de Kéro + fluide hydrau derrière l’avion. Le souci, ici, était de savoir si les galeries/tuyauteries et systèmes de transfert étaient toujours opérationnels afin de pouvoir transférer le Kéro du côté gauche à droite et à l’arrière. La décision de l’équipage a été unanime : impossible de savoir si ils sont opérationnels donc aucun transfert de Kerosène (je reviendrai plus tard sur la conséquence de cette décision).
Les problèmes électriques ont conduit à la perte : _ Wing-brakes
_ Anti-skids
_ Leading-edge slats
_ Pression d’air
_ Air
_ Climatisation
_ Perte d’une des ordinateurs de commande des trains d’atterrissage, il était donc impossible de savoir si les trains étaient sortis ou non (utilisation du système d’extension/rétraction)
_ Autothrust et de tout le contrôle de la poussée a due se faire manuellement
Enfin les moteurs n°1 et 4 étant en mode « dégradé », seul le 3 fonctionnant normalement, la vitesse de l’avion n’était contrôlée uniquement que par le moteur n°3.
Est ensuite venu, la question : Est-il possible ou non de se poser sur la piste disponible ?
Il n’était pas possible « d’amortir » la masse de Kérosène embarqué et donc le surpoids de l’avion (le système étant inutilisable), surpoids d’environ 50 tonnes par rapport à la masse d’atterrissage maximale autorisée. L’application de performance a donc été utilisée. Cette application permet sur l’A380 de calculer les performances de l’avion lors de l’atterrissage en fonction des conditions extérieures et de certains paramètres (informés manuellement par les pilotes). Sur les 10 premiers paramètres pouvant affecter l’atterrissage et renseignés par l’équipage, l’application n’a pas été en mesure de faire le calcul… trop de problèmes, d’incidents. Le temps étant sec et l’expérience de l’équipage faisant, ils ont décidé d’éliminer certains paramètres, le calcul a alors pu être réalisé et les réponses ont été les suivantes : _ vitesse de descente de 165 kt
_ Longueur d’arrêt supplémentaire de 130m (sur une piste de 4000m)
_ « Normalement » atterrissage ok…
La perte des leading-edge slats associée au surpoids a conduit à une approche plus rapide que prévue (~35kt). Enfin l’impossibilité de transférer du kérosène a conduit à un gros déséquilibre d’environ 10 tonnes, il fallait donc savoir si le CoG de l’avion s’en trouvait modifié ou non => utilisation de l’application Weight and Balance afin de déterminer la position du CoG. Il en a résulté que le CoG se trouvait toujours dans l’enveloppe de vol, donc aucun souci.
Tout une phase de contrôle des commandes (celles qui fonctionnaient encore… ^^) s’est faite avant l’approche afin de vérifier la maniabilité et les perfo de l’avion. L’approche s’est ensuite faite à 20 miles et à environ 4 000ft (approche longue, douce et stable).
J’en arrive donc à la dernière phase de mon récit, l’atterrissage et notamment à ce qui s’est passé après l’atterrissage.
Une fois l’atterrissage réalisé, il a fallu organiser les secours et notamment les services incendies en bout de piste. Les gros problèmes qui se sont rapidement posés ont été :
_ Problème d’APU qui fonctionnait mal et donc ne pouvait fournir aucune charge électrique (pas top une fois au sol…). Ca à donc conduit au passage de l’avion en mode « essential ou battery power » qui implique que seule la VHF était disponible, pas évident pour communiquer avec les secours.
_ Le moteur n°1 tournait toujours, impossible de l’arrêter, personne ne voulait donc s’approcher de l’avion.
_ Fuite de Kérosène côté gauche (haute pression)
_ Les efforts au freinage étaient tellement importants qu’ils ont conduit à une température au niveau des freins d’environ 900°C => associée à la fuite de Kérosène => risque d’incendie
Comme je l’avais dit précédemment, l’incident en vol a duré environ 2 heures. Il en a été de même pour la suite de l’atterrissage (problèmes cités ci-dessus…). Entre le moment où l’avion s’est posé et le où le dernier passager à quitté l’avion, il s’est passé 2 heures…. Cette décision d’attendre a été prise par l’équipage pour des raisons de sécurité. Au cours des ces 2 heures, il a fallu gérer la perte de la VHF, remplacé par le téléphone satellite qui a lui-même lâché quelques minutes plus tard, remplacé enfin par le téléphone portable (relais entre l’équipage, la compagnie basée à Sidney et Singapour). Il a également fallu gérer les passagers pendant ces 2 heures d’attentes sans climatisation, en pleine chaleur (~12h à Singapour à ce moment là…).
Pour la petite anecdote le moteur a été arrêté en utilisant diverses mousses afin d’étouffer le moteur et de le ralentir progressivement.
Pour David Evans, le plus dur a été de gérer les passagers, de les rassurer au maximum mais également de gérer l’équipage. Gérer l’équipage dans le sens ou il a fallu faire la part des choses et savoir dissocier les messages ECAM (grand nombre) utiles de ceux « sans » importance. Il a également fallu faire les bons choix au bon moment.
Pour lui, n’importe quel bon équipage standard aurait pu faire la même chose et réussir à poser l’avion comme ils l’ont fait. Il l’a dit lui-même : « Nous avons juste eu la chance ce jour là, d’avoir 2 personnes de plus, un équipage plutôt expérimenté qui a pu confirmer les décisions et avoir un « certain » recul par rapport aux ECAM ».
Il a rajouté que l’A380 était une magnifique machine et que cet incident l’a conforté dans cela. Pour lui ça n’a en aucun cas changé sa vision et sa confiance en cet avion.
L’A380 ayant subit de gros dommage et les procédures étant assez longue, l’avion n’a repris du service qu’en mars/avril 2012, soit environ 16 mois après l’incident…
Voila, j’espère avoir été clair et surtout que cette histoire vous aura plu. Désolé s’il y a certains termes techniques, si vous avez des questions ou vous voulez des explications/traductions n’hésitez pas. Enfin je n’ai pas parlé des causes de l’accident et des dégâts sur l’avion et notamment au niveau de du fuselage. Je pense que ça aurait fait beaucoup
Quelques liens intéressant :
Le Trent 900 de RR: http://fr.wikipedia.org/wiki/Rolls-Royce_Trent_900
En bonus une petite vidéo expliquant le fonctionnement d'un turboréacteur, malheureusement en anglais... mais la vidéo est vraiment bien faite et c'est possible de comprendre uniquement avec la vidéo
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